Ça ne vous à pas suffit, je le sais je le sens, à vous voir me tourner autour, à vous sentir roder dans l’ombre, vous voulez vraiment savoir ce que le Prince des Chats de Gouttière a sur le cœur ???
Alors on va faire ça je vais vous raconter une histoire.
Une partie de mon histoire, pas pour remplacer celle que vous n’avez pas eu l’autre soir, ni pour justifier ma grève.
Non juste parce qu’il est temps
C’est une question de morphologie… Tu cours des heures, tu ne manges que des plats en sauce et des pizzas, tu bois 2 litres d’eau par jour tu t’es remis à la bière et tu ne prends pas un gramme ?
C’est une question de morphologie…
C’est toujours une question de quelque chose.
Quand le désagréable ou le malheur se fait sa petite place dans nos petites vies.
Quand tous les efforts du monde sont incapables d’améliorer le quotidien.
C’est la faute à quelqu’un, à quelque chose, toujours.
C’est plus rassurant… C’est une question de diplomatie, de rendements, de compatibilité, de différence d’âge ou de morphologie…
Nous sommes devenus maîtres dans l’art de trouver des excuses à nos déboires…
L’art de nous dédouaner de nos malheurs personnels…
Nous passons nos journées à chercher quelqu’un ou quelque chose pour porter le chapeau de nos déceptions.
Tout le monde déprime en ce moment, c’est une question de période, hiver oblige, la déprime saisonnière qu’on appelle ça il paraît.
Tu assistes à une multitude de rupture, c’est l’effet domino lié à la classe d’âge que tu fréquentes et à son vieillissement.
Un bouc émissaire, un responsable, ça permet de se décharger du trop plein de douleur…
Ça va ? »
Je ne réponds jamais à cette question… Jamais… J’enchaîne directement avec « Et toi ? ». Parce que tout le monde s’en balance, finalement, de savoir si ça va…
Je ne réponds jamais et je le fais consciemment parce que je suis l’ordure je m’en foutiste que tout le monde voudrait être, cynique, méchant gratuitement, mais tellement drôle.
Parce que moi au moins je suis lucide sur le monde, les autres et sur moi.
On ne devrait jamais poser de question si on ne veut pas entendre la réponse.
Tout part de là, une simple question…
Même pas une question importante…
Non, une simple formule de politesse tournée en question dont la réponse n’intéresse plus personne depuis longtemps.
Et si pour changer, rien qu’une fois, une seule fois dans une vie, on se donnait la peine de l’écouter cette réponse…
Quand je me suis fait jeter du lycée, je me suis promis de faire de ma vie une passion, ou de faire de ma passion une vie. Je me suis mis à bosser sur des courts-métrages, et mis dans la tête que je serais écrivain, j’ai recommencé à écrire mon premier roman et des nouvelles, 12 ans plus tard, après ne pas avoir fait tout Paris mes nouvelles et mon roman sous le bras sous le bras j’en suis ou ??
j’écris durant mes nuits d’insomnie sur mon Mac fatigué orientant l’écran de manière à pouvoir voir les touches car je ne suis toujours pas capable de taper sans regarder mon clavier.
12 ans plus tard j’en suis ou ??
j’écris des romans que personne ne lira, des contes pour enfants que je n’aurais pas, et des scénarios que personne ne tournera mettant parfois les mots des autres à la place des miens parce que je n’ai aucun talent et qu’eux en on tant.
Je me suis fait avoir…
Sur toute la ligne… Je le sais… A la base, comme tout le monde j’avais les bonnes cartes en mains et puis…
À trop réfléchir, trop sortir, trop boire et pas assez dormir un jour les digues patiemment construite cède sous le poids du refoulement et c’est la catastrophe…
Un jour, le barrage pète, à cause d’un coup de téléphone surgit du passé et plus rien ne va.
Une simple voix surgit du passé et quelques mots…
Un coup de fil passé sans y penser parce que sûrement en pleine rupture et saoule elle a pensé à moi, à nous, avec nostalgie.
Un coup de fil qu’elle aura oublié, demain en se levant pour aller bosser.
Et moi j’en suis ou ???
J’en suis là, devant mon ordi, en train de réécrire pour la énième fois ce même texte…
Ce texte drôle et plein d’esprit me permettant de me dire que finalement ma vie amoureuse n’est peut-être pas si pitoyable…
Lorsqu’elle m’a quitté, j’ai lancé dans l’air de ma vie des envies de vengeances et de justice.
C’était la faute à L’autre, le bellâtre à mèche avec lequel elle a « rebondi » de nous deux.
Et puis c’était la faute à la différence d’âge, aux directions divergentes des chemins de nos vies.
C’était la faute au brouillard et à la bruine, à la conjoncture économique, à George W. Bush et aux fonctionnaires.
Un bouc émissaire, un responsable, ça permet de se décharger du trop plein de douleur…
C’est rassurant.
Alors que pendant tout ce temps, c’était la faute à ma gueule, à moi, myself, mi, et tout et tout…
Je me suis rendu compte de la bêtise de tout cela en ne dormant pas ces derniers mois
Je dis elle, mais je pourrais dire Cécile, Alexandra, virginie, Marie toutes ces filles au visage flou dans ma mémoire...
Si Fiana m’a quitté, c’est parce qu’elle ne m’aimait plus. Et si Marie ne m’aimait plus, ce n’était pas la faute de cet abruti d’autre, des 5 ans de différence, de l’élection de Bush, ni celle des bureaux de poste qui ferment à 17h00 et pas une seconde après…
Non…
Si Alexandra m’a quitté, c’est la faute à ma jalousie, à ma dépendance en sa personne, à mon incapacité à accepter le moindre de ses désirs destiné à d’autres que moi, à me satisfaire d’elle, de la chance qu’elle m’ait choisi.
À rester englué dans mon passé, dans mes relations d’avant, dans un idéal qui n’existe pas…
Vraiment pas… Mon égoïsme, et un manque de confiance en tout…
En l’occurrence, elle et moi. Nous.
Si Cécile m’a quitté, c’est parce que je suis un lâche et qu’un lâche ne sait pas assumer l’envie de l’autre. Parce que je lui reprochais de ne jamais avoir envie de moi lorsque j’avais envie d’elle. Parce que j’avais transformé son corps en un objet utilitaire.
Lorsque Virginie m’a quitté, nous avons repassé une nuit ensemble.
Quelques semaines plus tard… Comme dans toutes les ruptures…
Elle s’est permis de me donner un conseil pour mes conquêtes à venir.
« Tu sais, il y a autre chose chez la femme qu’un clitoris et deux tétons. »
Je suis entre ses jambes lorsqu’elle me dit ça, la voix bordée d’ennui.
Si elle m’a quitté, c’est parce que nous n’avions plus rien à vivre ensemble. Je pense que quelques semaines de plus, et j’en serais arrivé aux mêmes conclusions.
Elle commençait à m’exaspérer, avec ses remarques hautaines et ses raccourcis moralisateurs.
Elle m’agaçait avec cet amour inconditionnel qu’elle portait à des films sans intérêt et sans public.
Elle m’irritait au plus haut point lorsque, sûre d’elle, elle me reprochait ma méchanceté gratuite quand je savais que sa gentillesse n’était qu’un leurre.
Si elle m’a quitté, c’est parce que notre histoire comme toutes celles d’avant était finie avant même d’avoir commencé.
D’ailleurs pour être tout à fait honnête, c’est moi qui l’ai quitté.
Par lâcheté, par peur de ce vers quoi nous allions.
Plutôt que de devoir subir la séparation dans les larmes et les cris j’ai pris les devants et je l’ai quitté un matin dans une brasserie des halles, entre les mégots et l’humeur grisâtre du garçon, devant un mauvais café, regardant les larmes dans ces yeux en faisant le fier, le raisonnable « tu verras c’est la meilleurs solution »…
Le pire c’est que j’avais raison, du moins pour elle….
Je l’ai quitté pour ne plus avoir à supporter ses yeux de chiens battus le matin et son regard lourds de reproches inexprimés
Ça sonne comme quelque chose que vous avez déjà entendu, mais ça ne l’est pas.
Je me suis engagé dans cette histoire avec mes vices cachés et mes défauts de construction. Je n’en avais pas conscience, mais en ne m’attachant pas à me réparer d’abord, je condamnais notre relation dés ses balbutiements.
Je tomberais en rade deux ans et des brouettes plus tard.
J’ai compris tout cela parce que je ne dors plus…
Parce qu’avec elle j’ai réitéré le scénario maintes fois répété avant elle…
Parce que j’ai fait les mêmes conneries. Que j’ai eu les mêmes faiblesses. Parce que je ne suis pas passé par le contrôle technique.
Avant d’être heureux à deux, il faut savoir être heureux tout seul.
Ça sonne comme quelque chose que vous avez déjà entendu, mais ça ne l’est pas.
Je vous le promets. Vous avez l’impression d’avoir déjà lu ça quelque part, mais ce n’est pas le cas.
Vous avez le sentiment d’avoir déjà-vu tout cela la semaine dernière dans un film ou une émission sur le câble, mais vous vous trompez.
Vous vous trompez parce que cette histoire est la mienne.
Je peux vous dire d’où vous vient cette impression.
Ce chatouillement familier derrière le front.
Ce sentiment de déjà-vu. Ce qui vous fait dire que cela vous semble familier.
Si vous avez cette drôle de sensation, c’est parce que toutes les ruptures sont identiques.
Si vous avez cette drôle de sensation, c’est parce que cette histoire pourrait être la vôtre, ou celle de votre meilleur amis du moment, ou de votre voisin, cette histoire est vielle comme le monde et continuera de vivre et de revivre tant que le monde vivra.
C’est l’histoire d’une rupture, de toutes les ruptures.
C’est aussi en partie l’histoire de ma vie, trente ans à courir, à me cacher des autres et de moi-même, surtout de moi même.
Trente ans à faire semblant.
Tout ça pour, quoi ???
Je me suis levé ce matin…
Le jet d’eau bouillante me lacère le visage ce matin, mais je ne bouge pas…
Je laisse la douleur se transformer en caresse, quand ma peau rouge arrête de se battre et se laisse aller à la brûlure. Je ne tends pas le bras vers le shampoing, je laisse juste la chaleur inonder mon front, mes joues, ma bouche et mes yeux, fermés.
Je ne laisse pas les larmes couler ce matin, parce qu’un garçon, ça ne pleure pas…
Je me donne envie de vomir ce matin, parce que je me mens à moi-même…
Je ne laisse pas couler mes larmes parce que je n’en ai plus, elles se sont toutes évaporées pendant la nuit, recroquevillées dans mes draps, cachées dans les plis du coton…
Je me suis levé ce matin…
Je ne reconnais pas mon visage dans les brumes de mon miroir.
Derrière le flou se tient un homme que je n’ai jamais vu. Les yeux rougis, le teint pareil…
Je ne passe pas ma main sur le verre pour envoyer le trouble balader…
Non je me rase à l’aveuglette en marmonnant une prière à je ne sais qui pour ne pas m’égorger avec le rasoir.
Je me suis levé ce matin…Je me suis levé ce matin…
Du salon, là, juste à gauche du canapé, à deux mètres de la table basse, je vois les tours du sacré-Cœur celle de Mont parnasse, celle de Gustave, et aussi celle de la Défense plus loin, dans le froid du soleil.
Je me suis levé ce matin, comme tous les matins, fatigué d’avoir une fois de plus trop veillé.
Je me suis levé ce matin et j’ai pris conscience de tout ça, alors je me suis à écrire…
Une fois de plus…
Ecrire pour ne pas craquer, pour essayer d’y voir clair au moins une fois…
Jusque-là je me disais que les filles que je ne rappelais pas après un coup d’un soir s’en foutaient pas mal…
Ces filles que quelques verres de Vodka pommes ou de champagnes permettent d’apprivoiser juste assez pour accepter de se faire toucher les lèvres. Celles-là même qui nécessiteront nettement plus d’efforts pour les convaincre de monter prendre un dernier verre et tout ce que ces quelques mots promettent…
Où est donc passé le temps béni où « monter prendre un dernier verre » était la promesse d’une histoire naissante…
Mais maintenant, je sais…
Jusque-là je m’imaginais le fil de leurs pensées, le lendemain, en sortant de chez moi, ou moi sortant de chez elles…
Ces paris sur l’avenir qu’elles lancent, pendant ces quelques minutes passées dans le froid, espérances de bouche de métro chaude et moite, dans cet air qui vous cisaille les poumons, parce que finalement, en hiver à Paris, le climat n’est pas si tempéré que ça…
Ces espoirs qu’elles bâtissent en me regardant partir, tourner au coin de la rue, ou déjà de retour sous les couettes, tentant de voler quelques minutes de répit, de sommeil, à cette vie qu’elles ne vivent déjà plus…
Elles analysent, elles ressassent les bouts d’heures qui les ont amenés à se réveiller à mes côtés ce matin, et elles résument…
Elles ont couché avec ce mec…
Sympa mais sans plus…
Pas mal mais sans plus…
Passable au lit, mais sans plus…
Ce mec c’est moi…
Et moi, je m’imagine que de toute façon, elles n’en ont rien à foutre, qu’elles ne veulent pas d’un mec sympa, pas si mal au fond et passable au lit…
Maintenant, je sais…
Avant, je m’en remettais à une routine rassurante :
Je ne les rappelle pas…
Je ne les rappelle pas, et je me conforte en me disant qu’en sortant du métro, le nom de ma rue leur échappe déjà…
Qu’en s’arrêtant pour acheter le croissant que je ne suis pas allé leur chercher au réveil, mes traits deviennent flous dans leur mémoire…
Qu’en mâchant mon absence de galanterie en même temps que leurs croissants, elles se rendent compte qu’elles sont incapables de se souvenir de ce dont on a bien pu parler hier.
Quand elles tournent les clés dans la serrure de leur porte, elles ont du mal à ne pas mélanger les lettres de mon nom…
Et quand l’eau chaude de cette douche qu’elles ont refusé de prendre chez moi frappe leur visages, celui-là même qui hier captait toute mon attention, qui il y a quelques heures encore figeait en lui toute la jouissance du monde, c’en est fini… Mon souvenir glisse avec l’eau et le savon le long de leurs courbes, passe une dernière fois sur leurs seins, leurs hanches, leurs cuisses, et disparaît dans le siphon, quittant le tourbillon de leur vie pour rejoindre celui de l’évacuation des eaux usagées de la Ville de Paris , et çà me rend lyrique…
En anglais, on dit « Back to oblivion »….
Maintenant je sais, ou plutôt je me souviens…
Un simple coup de téléphone venu d’outre-manche et les souvenirs envahissent ma tête…
Je sais les espoirs… Je sais les projets… Je sais les envies… Je sais …
Je sais les quelques premières heures, celles où l’on est incapable de ne pas s’emballer en se disant que peut-être cette fois…
Ces quelques heures où tout est possible, où le manque de sommeil et le trop plein d’amour rend léger et ivre.
Je sais ces heures passées, quand l’envie de rappeler devient trop forte…
À poser son portable sur la plus haute étagère…
À le laisser là et sortir manger un petit quelque chose pour ensuite se forcer à aller au cinéma…
Tout faire pour ne pas trop penser à cette nuit et ce qu’elle contenait de promesses…
Je sais la sortie du film que l’on a à peine regardé et le pas dansant en rentrant…
Les clés qui tournent dans la serrure avec peut-être un peu plus de nervosité que d’habitude…
Je sais la porte refermée à la va vite…
Je sais les quelques pas qui séparent de ces étagères et du téléphone…
Je sais le bras levé et le cœur qui manque de se faire la malle à chaque battement…
Je sais les yeux sur l’écran…
Bouygtel…
Pas d’appel en absences…
Vous n’avez pas de nouveaux messages
Les jambes qui se coupent, et le cerveau qui s’active pour trouver les différents scénarios possibles.
Elle a dit qu’elle bossait avec une amie aujourd’hui…
Elle doit être occupée…
Ou alors elle dort…
Elle dort depuis qu’elle est rentrée, c’est pour ça qu’elle n’a pas rappelé…
Elle devait être morte de fatigue, on a pas dormi de la nuit…
Non…
JE n’ai pas dormi de la nuit…
Elle, de son côté, elle a plongé comme une masse en oubliant la soirée…
Elle a ronflé même, on avait un peu trop bu…
De l’imaginer ça m’a empêché de fermer les yeux…
Ça m’a obligé à la détailler dans le jour de mes nuits, dans cette lumière qu’un réverbère juste devant la fenêtre, que je n’ai jamais voulu cacher derrière un rideau, lance à l’intérieur…
Obligé à la regarder du fond de ma mémoire, dans la lueur orangée de Paris la nuit, recroquevillé sous ma couette le Mac sur les genoux.
Et pendant ce temps passé à ne pas dormir, je me suis rendu compte que ses ronflements, je pourrais les trouver mignon, que je pourrais prendre goût à son nez un peu retroussé, mais juste ce qu’il faut. Que mes mains remplies de ses seins s’y sentiraient bien.
Les camions poubelles de 8h00 ne m’ont pas réveillé, je ne dors toujours pas…
Maintenant je sais…
Je sais le désir que cette nuit ne soit pas la seule, et la déception qu’elle le devienne…
L’envie de me retrouver pris dans la tempête de son existence…
Je sais que personne ne rappellera…
Que la prochaine fois que je la verrais à un dîner j’aurais ce petit sourire coincé de ceux qui ne sont pas l’aise, et je boirai trop comme je sais si bien le faire, faisant le pitre.
J’aurais un petit pincement au coeur…
Je ferais ce que je pourrais pour ne pas l’imaginer nue…
Et je continuerai à mentir, à faire semblant, m’enfonçant de plus en plus derrière mes murailles, à faire le clown parce que c’est plus simple et que ça arrange tout le monde…
Surtout moi d’ailleurs.
Je sais l’espoir d’une promesse qui n’en est pas une.
Je sais ou plutôt je me souviens…
Je me souviens de tout cela, en vous voyant vivre, vous et vos relations, bancale, triste, heureuse.
Je me souviens en vous.
De toute façon, je ne parlerai qu'en présence de ma vodka